Programme anti-crise : la seule issue est un plan de relance socialiste

Les banques à peine passées à la caisse des gouvernements, elles font à nouveau la queue, accompagnées cette fois des mastodontes industriels. Des tabous ont été brisés en un clin d’œil. Rien ne semble plus fonctionner. Chaque plan de relance est suivi d’un autre, plus grand, plus ambitieux. Dans l’intérêt général ? Nous serions curieux de voir le bilan une fois les dégâts mesurés. Nous parions que les banquiers, industriels et autres spéculateurs auront mieux été servis que nous. Le Parti Socialiste de Lutte (ex-MAS) défend un autre plan de relance. Seul un plan favorable aux travailleurs et à leurs familles pourrait selon nous véritablement offrir une issue à la crise.

Que doivent penser aujourd’hui les milliards de gens victimes de la famine ? Ceux qui disposent à peine d’eau potable ? Ceux qui n’ont aucun accès aux soins de santé élémentaires ? Ceux qui errent quelque part sur cette planète en fuyant la guerre ou la guerre civile ? Que doivent penser ceux qui ont perdu leur emploi ? Les sans-abris? Ceux qui ne parviennent pas à finir le mois avec leur salaire ?

Il n’y avait pas d’argent pour leurs problèmes, les travaux d’infrastructure nécessaires étaient impayables et il leur fallait patienter quelques générations. Mais ces derniers mois, des sommes colossales ont été dépensées alors qu’une fraction seulement de celles-ci aurait suffi pour soulager leur sort. Mais cet argent a été utilisé pour débarrasser les spéculateurs de leurs mauvaises créances et pour recapitaliser les banques.

Ces dernières années ont pourtant été très bonnes, avec des profits record, des projets mégalomanes et des fêtes extravagantes pour les millionnaires. Tout cela n’a été possible qu’en augmentant fortement l’exploitation des travailleurs. Les profits record n’ont pas été investis en nouvelle production, ni en travaux d’infrastructure socialement utiles, mais ils ont été réservés à la spéculation. Entre 2003 et 2008, les « investissements » sur le marché des « futures » pour les matières premières (celles qui n’ont pas encore été produites) sont passés de 13 à 260 milliards de dollars. Suite à cette spéculation, les prix des denrées alimentaires ont crevé le plafond avec en conséquence la famine et les émeutes de la faim.

 

Sauvegarder le pouvoir d’achat!

  • indexation des salaires,
  • blocage des prix,
  • abolition de la tva,
  • nationalisation des secteurs clés

En Belgique, cela n’a pas atteint une telle ampleur, mais les prix alimentaires ont quand même fortement augmenté. En juillet 2008, les spaghettis coûtaient 31% de plus qu’en début d’année. Le prix du pain, fixé par la loi jusqu’en juin 2004, a grimpé depuis lors de 25%. D’autres produits de base sont également devenus plus chers: le fuel de 61%, le gaz naturel de 52% et l’électricité de 20%. La diminution du prix des blackberry’s, des écrans plats et d’autres gadgets ne nous ont pas aidés et l’indexation des salaires n’a pas pu suivre le coût de la vie. La crise fait s’envoler les prix des produits de base plus que les autres, comme l’illustre le calcul des CPAS de Wallonie sur les dépenses spécifiques des foyers pauvres : celles-ci augmentent deux fois plus que l’indexation officielle. Et nous ne nous sommes encore qu’au début de la crise.

Après une baisse de la consommation, les prix diminuent à nouveau. Mais comme nous l’expliquons dans l’article ci-contre, un nouveau sursaut de l’inflation n’est pas à exclure dans une phase ultérieure de la crise. Les travailleurs et leurs familles doivent s’armer contre le coût de la vie avant que la crise ne les pousse dans la pauvreté. Cela demande la restauration complète de l’indexation avec un panier de référence qui reflète vraiment le coût réel de la vie. Cela doit être le fait d’une commission indépendante composée des syndicats, d’organisations de défense de consommateurs et de petits producteurs qui doit aussi pouvoir fixer légalement les prix des produits de première nécessité.

Les syndicats et des partis de la gauche radicale revendiquent une diminution de la TVA sur l’énergie de 21% à 6%. C’est bien, mais toutefois insuffisant. Le mouvement ouvrier s’est opposé jadis à l’introduction de la TVA, identique pour chacun quel que soit le revenu. Nous plaidons pour l’abolition pure et simple de la TVA, particulièrement sur les produits de première nécessité. L’énergie est d’une importance stratégique et devrait appartenir à la collectivité. Tout comme la FGTB dans les années ’70, nous plaidons pour la nationalisation sous contrôle ouvrier démocratique de tout le secteur de l’énergie ainsi que pour des prix fixés légalement.

 

  • logements sociaux,
  • infrastructure publique,
  • refinancement de l’enseignement et des soins de santé

Le logement représente une dépense d’importance dans le budget familial. Entre 1997 et 2007, le prix des maisons a augmenté de 142% dans notre pays ! En 2005, il restait aux locataires 16% de leur revenu en moins par rapport à 1992 après avoir payé leur loyer. Cela s’explique principalement par le manque de logements sociaux. Ce n’est qu’en décuplant l’offre de logements sociaux bon marché et confortables qu’on pourra faire baisser les loyers, y compris dans le privé. Sinon, les locataires continueront à s’installer dans des maisons insalubres, parfois même aux dépens de leur sécurité et de leur santé. Nous ne sommes pas favorables à un système d’allocations-loyers puisque les propriétaires vont d’avance en tenir compte pour déterminer le loyer tandis qu’une limitation légale des loyers à un pourcentage maximal du revenu peut conduire à une situation où toutes les portes seraient fermées aux faibles revenus. Mais, accompagnée d’une extension massive du secteur des logements sociaux, cette dernière mesure pourrait avoir un effet.

Le maintien et la rénovation des bâtiments publics ont également été négligés durant des années. Seuls les projets de prestige ont pu bénéficier d’argent alors que bien des écoles sont insalubres. Dans quelques écoles, des cours se donnent depuis des années dans des préfabriqués. Dans quelle société vivons-nous? Quand l’économie tourne à plein régime, il n’y a pas d’argent. Il faut qu’arrive une crise pour que des investissements nécessaires soient pris en considération, et encore avec des partenariats publics-privés (PPP). En général, cela signifie beaucoup de déoenses publiques et des profits juteux pour le privé. Le Parti Socialiste de Lutte plaide pour des investissements financés à 100% par le public.

Il est courant d’entendre les politiciens vanter la place des sciences dans notre avenir. Pourtant, l’enseignement est traité de façon lamentable. Il y a trente ans, 7% du produit intérieur brut étaient dépensés pour l’enseignement, contre environ 4,5% actuellement. Plutôt que de refinancer publiquement l’enseignement pour en revenir aux 7%, on en arrive, comme avec le décret mixité, à des solutions de tirage au sort pour accéder à des écoles de meilleure qualité!

Le secteur des soins de santé doit aussi être refinancé. Nos soins de santé ont jadis été parmi les meilleurs, mais la commercialisation du secteur et la priorité accordée au profit ne mine pas seulement la qualité des soins, mais augmente aussi les frais pour les patients. Les médicaments coûtent aussi trop cher, mais cela ne se résout pas par des offres publiques, comme le propose le docteur ‘kiwi’ Van Duppen. Notre pays a un secteur pharmaceutique important et nous ne voulons pas lui offrir l’excuse d’opposer les intérêts des patients à ceux des travailleurs de ces entreprises et de récupérer la différence de rentrées sur le dos de ces travailleurs en économisant sur les salaires et les conditions de travail. Le Parti Socialiste de Lutte plaide pour un service public national de soins de santé et pour la nationalisation du secteur pharmaceutique.

 

  • redistribution du temps de travail avec maintien du salaire,
  • interdiction des licenciements,
  • ouverture des livres de comptes
  • abolition du secret bancaire

Logements sociaux, travaux d’infrastructure, enseignement, soins de santé… nous saurions bien que faire des nombreux sans emplois et de ceux qui sont sur le point de le perdre. Nous organiserions la redistribution du travail disponible entre tous, sans perte de salaire évidemment – sinon beaucoup seraient obligés de compléter leur revenu par du travail en noir ou des heures supplémentaires. Ils ne l’avaient pas fait quand ils étaient au gouvernement, mais maintenant qu’ils sont dans l’opposition, les Verts flamands proposent la semaine des 32 heures, en compensant la perte de salaire par une allocation universelle pour tous, avec ou sans emploi. Cela semble intéressant, certainement pour ceux qui travaillent en intérim ou ont un autre boulot précaire. Mais ce n’est aucunement un hasard si cette idée vient à l’origine de libéraux. L’allocation universelle serait vite érodée par les augmentations des prix, jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien. Les capitalistes traiteraient les travailleurs encore plus comme des marchandises jetables «puisqu’ils ont quand même leur revenu de base». Des politiciens de droite opposeraient plus encore ceux qui «travaillent durement» et paient des impôts élevés aux «bénéficiaires » de l’allocation universelle. Les chômeurs n’existeraient plus, il n’y aurait plus que des «gens qui refusent de travailler et s’installent dans le filet de la sécurité sociale».

Dans la lutte contre le chômage, des voix s’élèvent pour interdire les licenciements collectifs dans les entreprises qui font des profits. Nous sommes pour, mais cela exige un accès complet à toute l’information économique pour les travailleurs. Cela est donc impossible sans l’ouverture des livres de compte et la levée du secret bancaire. Il faut par ailleurs se demander si les entreprises qui font des pertes mais garantissent les revenus de nombreux foyers de travailleurs et même de toute une collectivité ont le droit de licencier. Nous pensons qu‘à chaque restructuration, à chaque délocalisation, à chaque fermeture, il faut considérer la question de la nationalisation. L’indemnisation doit se limiter aux petits actionnaires, et seulement sur base de besoins prouvés.

 

‘Bad Bank’, retour à la CGER,… ou Nationalisation du secteur financier?

Les opérations scandaleuses de sauvetage du secteur bancaire, que nous payerons en tant que contribuables, ont lancé un nouveau débat. Certains plaident en faveur d’une « bad bank », une « mauvaise banque » dans laquelle seraient regroupées toutes les créances toxiques. En bref, au public de reprendre gratuitement tous les risques. Cette proposition scandaleuse rendrait les spéculateurs encore plus hardis: «allez-y, le public paie!». D’autres appellent à la création d’une banque publique. Celle-ci prendrait moins de risques en échange d’un rendement inférieur. «Rendez-nous notre CGER», semblent-ils dire. En plus du fait que cela ne résoudrait en rien la crise, cette idée crée une image erronée de l’ancienne CGER, qui était un îlot public dans un système où le marché dicte ses lois. La CGER a dû se mouiller et a finalement été absorbée par le privé. Les seuls à qui manque une telle banque sont les fils-à-papa des vieux politiciens qui utilisaient les comités directeurs des intercommunales et des institutions publiques, comme la CGER, comme tremplin vers un poste plus lucratif dans le privé.

Pour une fois, nous sommes d’accord avec le professeur De Grauwe et l’économiste van de Cloot d’Itinera lorsqu’ils plaident pour la nationalisation de tout le secteur bancaire. Mais, pour nous, évidemment, avec une indemnité accordée exclusivement aux petits actionnaires sur base de besoins prouvés. Nous nous opposons aux arguments qui défendent la revente des banques au privé une fois ces dernières assainies et à nouveau rentables. Nous saisirions au contraire cette occasion pour rassembler tout le secteur bancaire et de crédit en une institution publique forte sous le contrôle démocratique de la collectivité. Au lieu de supplier les directions des banques pour qu’elles accordent des crédits, les autorités pourraient alors elles-mêmes planifier les investissements publics nécessaires.

 

 

Article par ERIC BYL

Auteur

Laisser un commentaire