Ils sont d’abord venus pour les migrant.es…

La déshumanisation dans le cadre d’une surenchère internationale pour « la politique d’asile la plus stricte possible ». C’est ce que représente l’Arizona. À la faveur du vent trumpiste, les droits des personnes migrantes sont quasiment réduits à néant, à tel point que les experts se demandent si cela respecte la Constitution. Le gouvernement s’attaque durement aux plus vulnérables. Et ce n’est qu’un début. Nous pensons immédiatement à la célèbre citation du pasteur Martin Niemöller « Quand ils sont venus chercher… » (*)

par Geert Cool

L’extrême droite ne fait officiellement pas partie de ce gouvernement, il n’en reste pas moins que la politique d’asile ne peut être qualifiée que d’extrême droite. Reste-t-il quelque chose de l’ancien programme anti-immigration en 70 points du Vlaams Blok qui n’ait pas été transformé en politique concrète depuis lors ?

Inouï et inacceptable

L’accueil des migrant.es se limite à « un lit, un bain, du pain et un accompagnement », et même cela n’est pas garanti. Après d’innombrables condamnations parce que le gouvernement belge fournit insuffisamment de places d’accueil, l’Arizona veut encore réduire la capacité existante et modifier la loi afin de pouvoir invoquer la « force majeure ». La protection sociale est progressivement supprimée, par exemple le droit à un revenu d’intégration ne peut être accordé qu’après cinq ans.

Les arrestations de personnes sans papiers dans les maisons, sans mandat de perquisition et sans consentement, deviendront possibles. Cela ouvre la porte à des raids qui ne se limiteront pas aux espaces publics.

Le regroupement familial deviendra encore plus difficile. Aujourd’hui, il n’est déjà pas évident pour les personnes migrantes de faire venir leur partenaire et/ou leurs enfants. Désormais, une période d’attente de deux ans est prévue pour les réfugié.es de guerre. Toute personne fuyant le génocide à Gaza devra donc attendre deux ans avant que le reste de la famille ne soit autorisé à venir en Belgique. Ceux qui inventent ce genre de chose feraient mieux d’essayer de survivre ne serait-ce qu’une semaine ou un mois à Gaza. Dans la pratique, cette période d’attente s’appliquera à la plupart des réfugié.es. En 2024, 39 615 demandes d’asile ont été introduites en Belgique, dont 14 % en provenance de Palestine, 11 % de Syrie et 10 % d’Afghanistan. Ce n’est pas la protection de plus en plus inexistante des réfugié.es qui crée un « effet d’aspiration », c’est la politique de guerre soutenue par le gouvernement belge qui crée un « effet de départ ».

Dans la procédure, même le semblant de « justice » est jeté par-dessus bord. Le Conseil du Contentieux des Étrangers (CCE) est en train d’être « réformé » pour permettre des procédures plus courtes et entièrement écrites, avec des décisions moins motivées et des possibilités d’appel limitées. L’aide juridictionnelle sera « évaluée », les procédures devant le CCE deviendront plus coûteuses, et il sera même possible de pénaliser les avocats pour les « recours manifestement illicites ». Certains professeurs de droit constitutionnel, de droits humains et de droit des migrations qualifient les mesures proposées de « sans précédent et aussi d’inédites, parce qu’elles violent la séparation des pouvoirs, l’indépendance du pouvoir judiciaire et/ou les droits fondamentaux ».

Les personnes qui souhaitent obtenir la nationalité belge et qui passent un « examen de nationalité » devront payer 1 000 euros au lieu des 150 euros actuels. Et pour cette somme-là, pas question d’en remettre en cause l’indexation, même à partir de 2027, contrairement à nos salaires et allocations… Là aussi, Conner Rousseau (Vooruit) peut s’en tirer à bon compte…

Solidarité et lutte

La vive polémique entre Musk et les partisans du MAGA autour de la migration a été l’expression des contradictions de la droite. D’un côté, ils surfent sur le racisme qu’ils alimentent autant que possible ; de l’autre, en tant que patrons, ils ne sont que trop heureux de faire appel à une main-d’œuvre bon marché qui peut être exploitée à outrance.

En Belgique aussi, des dizaines de milliers de sans-papiers travaillent chaque jour pour des salaires de misère et sans aucune protection. Par le biais de systèmes de sous-traitance, ils travaillent à la rénovation de stations de métro ou encore au nettoyage de palais de justice et d’autres bâtiments publics. La surexploitation exerce une pression à la baisse sur l’ensemble des salaires et des conditions de travail.

Les sans-papiers s’opposent à l’Arizona. Une délégation était présente à la manifestation du 13 février. La solidarité est nécessaire. Si le gouvernement s’en tire en déshumanisant une couche de travailleur.euses vulnérables, il continuera à le faire pour d’autres couches. En fin de compte, c’est l’ensemble des salarié.es qui seront visés ; c’est inhérent à la machine à profit du capitalisme. Au lieu de laisser les patrons et leurs politiciens nous briser doigt par doigt, faisons tout de suite un poing combatif ensemble.

(*) La citation du pasteur Martin Niemöller :

Quand les nazis sont venus chercher les communistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas communiste.

Quand ils ont enfermé les sociaux-démocrates, je n’ai rien dit, je n’étais pas social-démocrate.

Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.

Quand ils sont venus me chercher, il ne restait plus personne pour protester.

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