RÉVOLUTION DE 1830 La colère révolutionnaire déviée vers la création de l’État belge

Peinture de Gustave Wappers de 1834 sur les journées de septembre 1830. (Photo : Wikimedia Commons)

190 ans après le soulèvement révolutionnaire d’août, septembre et octobre 1830, loin de l’historiographie officielle belge, retournons sur les traces de l’insurrection prolétarienne et des évènements qui menèrent à la création du royaume de Belgique.

Par Alain Mandiki et Stéphane Delcros

Une grande partie de l’analyse qui suit – particulièrement concernant les évènements eux-mêmes – est basée sur l’ouvrage du militant socialiste Maurice Bologne publié en 1929 : L’Insurrection prolétarienne de 1830 en Belgique (1). D’autres références ont été utilisées ; elles sont répertoriées à la fin de l’article.

LE MYTHE DE LA BELGIQUE ÉTERNELLE

Beaucoup d’auteurs ont essayé de construire une histoire qui raconte que la Belgique a toujours existé. L’histoire belge aurait commencé à l’époque des Gaules. Cette « Histoire » était en fait une commande aux auteurs et historiens, de la part des autorités du jeune État belge qui avaient besoin de raconter un récit national et de justifier l’existence de la Belgique dans le concert international des nations. C’est bien sûr une vision tronquée de l’Histoire : rien n’existe de toute éternité.

Cette analyse est en réalité applicable à tout État-nation ; il s’agit de constructions assez récentes. Les États que l’on connait actuellement sont le fruit de la montée en puissance d’une classe, la bourgeoisie, et, en fonction du développement de cette classe dans les différents pays, on trouve le développement de l’État-Nation, ou son absence, ou son développement retardataire, comme cela a été par exemple le cas pour les États modernes allemand et italien.

Comme l’explique Anja Deschoemacker dans son analyse marxiste sur La question nationale en Belgique (2) : « La construction d’un État-nation est une tâche historique de la bourgeoisie. Dans ce sens, tous les États sont ‘artificiels’ (…). Mais là où la bourgeoisie, à l’époque de la création des nations, joue un rôle historiquement progressif et est reconnue comme dirigeante de la nation (parce qu’elle la construit et la fait progresser), à mesure que sa formation est tardive, la bourgeoisie a plus difficile à s’imposer de cette manière. Au plus la classe ouvrière a déjà été précédemment développée, au plus la bourgeoisie a tendance à se lier à l’aristocratie au lieu de la renverser pour contrôler la classe ouvrière. C’est ainsi que les choses se sont déroulées en Belgique. »

Concernant les évènements de 1830 dans la future Belgique, dans Een geschiedenis van België (3), le journaliste Marc Reynebeau souligne très justement : « Il n’était pas prévu qu’un État indépendant se développe immédiatement à la suite des émeutes. En tout cas, ce n’était pas l’intention avec laquelle elles étaient organisées. » (page 14). Dans cet ouvrage, d’autres éléments d’analyse que livre Reynebeau portent hélas le sceau d’un certain « romantisme belgicain ». La plupart des commentateurs, même s’ils peuvent être en désaccord entre eux, ont une interprétation « idéaliste » de l’Histoire ; leur analyse ne se base pas sur les rapports sociaux et la propriété des moyens de production.

Au contraire, les marxistes analysent la société et donc l’histoire en étudiant le développement de ses contradictions fondamentales. C’est ce qu’on appelle le matérialisme historique. Selon nous, les rapports sociaux de production et la propriété des moyens de productions définissent le développement de la société. C’est dans ce sens que, selon nous, la lutte des classes est le moteur de l’histoire. L’exemple de la révolution de 1830 illustre bien le fait que la confrontation entre les classes sociales ont abouti à la formation d’une nouvelle « superstructure », l’État belge, pour défendre au mieux l’intérêt de la bourgeoisie belge dans un contexte nouveau.

La pauvreté d’une histoire commune aux territoires de la future Belgique

À part un petit épisode de quelques mois en 1790, et qui ne concerne pas l’entièreté du futur État belge, jamais avant 1830 son futur territoire n’a été « indépendant » d’autres puissances. Souvent, même, ces territoires faisaient partie de puissances et autorités féodales différentes, en fonction du rapport de force. Le territoire du futur État belge a pendant longtemps été le siège de conflits entre différents Empires. C’était dû à sa position géographique favorable, un carrefour entre les différentes puissances européennes, et entre les différentes villes de commerce.

La proximité géographique et linguistique, comme partout, entrainait bien sûr l’existence d’éléments communs, culturellement par exemple. Mais à aucun moment il ne s’agissait d’un sentiment « national » commun, hérité d’une histoire commune entrainant une volonté « nationale » patriotique de se créer un avenir commun et libre.

Les historiens belges « idéalistes » ne sont pas les seuls à essayer de construire une histoire sur papier. Les courants nationalistes flamands, également « idéalistes », essaient de mettre en avant une Flandre éternelle qui aurait lutté depuis très longtemps pour son indépendance et son unification. Cela n’a pas été le cas, ni pour la Belgique, ni pour Flandre, ni pour la Wallonie ou toute autre entité construite « tardivement », comme conséquences de luttes des classes ouvertes qui verront l’avènement de la classe capitaliste au pouvoir.

LE CONTEXTE HISTORIQUE : LE POIDS DE LA BOURGEOISIE ET DU PROLÉTARIAT

La bourgeoisie est une classe qui a émergé dans les entrailles de la société féodale. Au sein de celle-ci, des serfs libres, artisans et commerçants, fondaient des villes franches, avec leurs marchés. Des tensions permanentes et conflits existaient bien sûr entre ces villes « libres » et le pouvoir féodal, mais ces villes pouvaient être administrées avec une certaine autonomie et selon les intérêts de ces artisans et commerçants. Au fil du temps, l’extension du pouvoir de l’importance de ces villes et du commerce de marchandises a accru les contradictions avec la société féodale.

Ces contradictions poussées à leur paroxysme ont parfois entrainé des révolutions bourgeoises, préparées idéologiquement par les « philosophes des lumières ». Ces révolutions correspondent à la prise du pouvoir d’une classe montante, la bourgeoisie, qui crée son outil de domination, l’État moderne, pour asseoir sa domination et l’exploitation d’une nouvelle classe en expansion, le prolétariat.
Il ne s’agit bien sûr pas d’un processus uniforme et linéaire. De nombreuses villes, de Gand et Anvers à Gênes et Venise, se sont formées sur ce modèle, bien avant la révolution bourgeoise. Tout dépend du rapport de forces entre les classes dans la société. Dès la fin du 18e siècle, la classe ouvrière naissante aura une influence considérable sur ces processus de révolutions ; c’est ce qu’on verra en 1830 dans ce qui deviendra la Belgique.

À partir de la moitié du 16e siècle, une partie du territoire du futur royaume de Belgique était, ensemble avec l’actuel royaume des Pays-Bas, sous le joug de l’Empire espagnol ; un régime couramment appelé les Pays-Bas espagnols. Les sept provinces du nord, majoritairement protestantes, déclareront leur indépendance en 1581, non sans refus de la part de la couronne d’Espagne ; c’est la république des Sept Provinces-Unies des Pays-Bas, qui mena une guerre d’indépendance, longue mais victorieuse. Les dix provinces du sud resteront sous le contrôle espagnol jusqu’au début du 18e siècle. La suzeraineté de ces provinces passera ensuite aux mains de l’archiduché d’Autriche vers 1714.

Pour en savoir davantage sur les développements des villes et États qui deviendront le territoire de la Belgique, nous conseillons la lecture de La question nationale en Belgique – Une réponse des travailleurs est nécessaire (2), particulièrement le chapitre 3 : « Un mot sur l’historiographie belge ».

Les soulèvements révolutionnaires de la fin du 18e siècle

La fin du 18e siècle sera une période charnière, marquée par des luttes de classes intenses, partout en Europe et au-delà. Cela était notamment dû aux premiers développements d’une classe prolétaire, tout de suite confrontée à une grande précarité et à des conditions de travail très dures ; ainsi qu’à une classe bourgeoise en pleine expansion, confrontée aux contradictions de l’organisation féodale de la société, qui limitaient leur expansion. C’est une période de confrontation plus ouverte entre la bourgeoisie et les forces de l’Ancien régime féodal, le clergé et la noblesse.

C’est dans cette période que s’inscrivent la révolution américaine et la guerre d’indépendance, des mouvements insurrectionnels ailleurs comme au Brésil, et surtout bien sûr la révolution française et les processus révolutionnaires en Europe. De grands changements auront aussi lieu au sein même des États monarchiques, dont l’élite comprenait qu’un minimum de transformations étaient nécessaires pour sauvegarder les intérêts de l’élite féodale face à la montée de la lutte des classes.

Les différents processus révolutionnaires de l’époque se sont alimentés les uns les autres. Mais, bien sûr, à travers le processus de révolution lui-même et ses guerres révolutionnaires, c’est surtout la révolution française qui aura un impact colossal sur la lutte des classes sur l’ensemble du continent.

La révolution française de 1789 sera d’ailleurs l’un des rares exemples d’un processus révolutionnaire qui a été « jusqu’au bout », jusqu’à la destruction de l’Ancien régime, aussi symboliquement abattu avec l’exécution du roi. Sans avoir ici non plus pu compter sur un développement uniforme et linéaire, la bourgeoisie a réussi à asseoir sa domination sur l’ensemble du territoire, à centraliser son pouvoir et à imposer la langue française à l’ensemble des régions, avec bien sûr des cas « récalcitrants ». Ce processus a pu aller loin aussi à travers la guerre révolutionnaire menée contre les puissances d’Ancien régime, soucieuses de ne pas se laisser faire face à la bourgeoisie qui voulait, aussi ailleurs, accéder à un pouvoir le plus complet possible pour défendre ses intérêts de classe.

Entre 1787 et 1790, aura lieu une poussée révolutionnaire, notamment connue sous le nom de révolution brabançonne, pour s’opposer aux réformes que l’archiduc autrichien et empereur du Saint-Empire Joseph II voulait imposer aux différents États des Pays-Bas autrichiens, qui comprenaient notamment le Brabant, le Hainaut, Namur et les Flandres.

Pendant quelques mois en 1790, les autorités de ces États proclameront leur indépendance commune, sous le nom d’États belgiques unis. Ce sera la première utilisation du terme « Belgique » pour un État indépendant, et par ailleurs la première apparition des couleurs du drapeau de l’actuel État belge, sur base des couleurs du blason du duché de Brabant, le cœur de cet éphémère État indépendant.

De même, fortement influencée par les soulèvements en France et la volonté de changement, la révolution liégeoise aura lieu en 1789. Elle chassa le Prince-Évêque, mis fin au régime long de huit siècles de la principauté épiscopale de Liège et instituera la République liégeoise, qui signera par ailleurs un traité avec les États belgiques unis.

La République liégeoise et les États belgiques unis disparaitront en 1791, suite à l’invasion autrichienne qui rétablira brièvement la principauté de Liège et le régime de la maison d’Autriche sur les 11 États des Pays-Bas.

Issue de la Révolution de 1789, la Première République française mena une guerre révolutionnaire et étendra son influence, notamment sur les territoires des Pays-Bas autrichiens et de la principauté de Liège, qui seront intégrés à la République en 1795 sous la forme de 9 départements. En 1815, à la chute de l’Empire napoléonien proclamé 11 ans plus tôt, les grandes puissances monarchiques européennes se réunissent au Congrès de Vienne. Elles y détermineront les frontières et les régimes des territoires issus de l’Empire. Sur les territoires des actuels royaume de Belgique et royaume des Pays-Bas sera créé le royaume uni des Pays-Bas, comme État-tampon à côté d’une France trop remuante, avec pour souverain Guillaume Ier, de la dynastie Orange-Nassau.

La bourgeoisie des provinces du sud veut une politique en faveur de ses intérêts

Durant la République puis l’Empire français, la classe bourgeoise était en développement dans les départements composants la future Belgique, particulièrement au sud, dans l’actuelle Wallonie. Les élites économiques dans l’industrie de l’armement, de la houille et de la métallurgie bénéficiait d’un marché élargit et d’une protection contre la concurrence surtout britannique. La législation était aussi favorable à leurs intérêts : une grande liberté pour le patronat et les propriétaires fonciers, permettant une exploitation brutale de la force de travail du prolétariat et la tenue de listes noires d’ouvriers qui, eux, n’avaient pas le droit de se réunir ni de contester en cas de non-paiement d’un salaire.

Le marché français sera perdu avec la défaite napoléonienne, mais la législation restera et la bourgeoisie pourra profiter du gain des colonies du royaume uni des Pays-Bas : les Indes orientales néerlandaises – l’actuelle république d’Indonésie –, le Suriname et les Antilles néerlandaises. Pour la classe bourgeoise du futur État belge, économiquement, ce n’était donc pas nécessairement une mauvaise affaire.

Pour cette bourgeoise émergente, des frustrations existaient pourtant. Tout d’abord, même si une partie de la bourgeoisie des provinces du Sud était anticléricale, une autre était catholique, contrairement à l’élite dirigeante du royaume, protestante. L’ensemble de cette bourgeoisie était par ailleurs francophone, opposée à la politique orangiste de déploiement du néerlandais. Cela génèrera des frustrations quant à la place de la classe bourgeoise montante du sud des Pays-Bas au sein de l’État d’Orange-Nassau, notamment concernant le régime scolaire, l’emploi des langues dans l’administration, la liberté de la presse et la représentation aux États généraux du royaume – c’est-à-dire une sorte d’assemblée ayant certains pouvoirs décisionnels. Notons qu’à l’époque, même si l’élite capitaliste parlait le français, influencée par les « Lumières » et la révolution, la population de la future Belgique ne parlait pas le français mais parlait, au nord, des dialectes néerlandais et, au sud, des dialectes des langues picarde et wallonne, issues de la langue romane dite « d’oïl ».

D’autres frustrations existaient. La bourgeoisie émergente au sud avait un caractère différent de celle présente dans le nord du royaume. Celle-ci était davantage commerçante, et donc partisane d’une politique libre-échangiste. Au sud, elle était davantage industrielle, favorable à une politique protectionniste. Elle voulait en effet l’instauration de mesures pour lutter pour la conquête du marché intérieur contre les industries étrangères, particulièrement françaises et britanniques. Ainsi, elle demandera au roi notamment d’augmenter les taxes d’entrée sur les produits des industries étrangères concurrentes.

Face à ces frustrations, les différents éléments constituant la bourgeoisie du sud se sont davantage unis : une bourgeoisie davantage catholique, présente dans les campagnes, notamment issue de la haute-noblesse et du haut-clergé, qui possédaient de nombreuses richesses et industries, y compris les principaux charbonnages du sillon Sambre-et-Meuse ; et une bourgeoisie davantage libérale, présente dans les villes, industrielle et commerçante. C’est ce que l’on appellera « l’unionisme ».

Le roi était conscient de ces frustrations, et a mis en œuvre des politiques pour tenter de les apaiser. Certaines volontés de la bourgeoisie du sud ont été réalisées. Notamment, des droits de douane de 8 à 10 % seront introduit, ce qui augmentait le prix des marchandises étrangères et protégeait donc artificiellement la production marchande dans les provinces du sud, et donc la bourgeoisie de ces provinces.

Le gouvernement procédera aussi au creusement de canaux, tel que le canal Charleroi-Bruxelles pour le futur acheminement du charbon par bateau, et fondera notamment l’université de Liège en 1817. En 1822, le roi initia la création de la « Société générale des Pays-Bas pour favoriser le développement de l’industrie nationale » – c’est-à-dire la future Société générale de Belgique – qui aidera notamment au financement de l’activité industrielle, principalement dans les provinces du sud.

Ainsi, la politique de l’élite dirigeante du royaume parvenait à apaiser certaines frustrations en satisfaisant leurs intérêts, mais des parties de la bourgeoisie présente dans le sud restaient mécontentes : elles voulaient davantage pour pouvoir continuer à accroître leur marché et donc leurs profits.

Cela dit, sous le régime d’Orange-Nassau, la bourgeoisie des provinces du sud s’est enrichie de manière exponentielle sur base de l’exploitation de la classe ouvrière naissante, aidée en cela par le régime. Elle défendra d’ailleurs plus tard cette exploitation de classe les armes à la main, comme nous le verrons dans la partie consacrée aux évènements de 1830.

On comprend qu’en réalité, la volonté de la bourgeoisie n’était pas du tout de s’émanciper d’une soi-disant « occupation hollandaise », comme on peut le lire dans l’historiographie officielle.

Le prolétariat naissant et la volonté des masses de sortir de leur condition

Le prolétariat était bien sûr peu nombreux à l’époque, mais tout de même plus nombreux que ce que l’on pourrait croire. Dès le début du 19e siècle, il était en croissance rapide.

C’est l’industrie textile qui à l’époque est la plus développée, surtout en Flandre Occidentale et Orientale, mais se développaient depuis quelques années aussi la métallurgie, surtout en province de Liège, puis en Hainaut, et les charbonnages, surtout en Hainaut, puis Liège. En 1826 et 1827 seront introduit à Seraing et à Marcinelle les premiers hauts fourneaux à coke du continent.

Maurice Bologne a donné une série de chiffres qui expriment bien ce processus de prolétarisation rapide. En 1802, Gand comptait 220 cotonniers ; en 1810, ils seront 10.000. Rien que pour cette industrie cotonnière, les provinces du sud comptaient 220.000 ouvriers en 1825, dont 150.000 rien qu’en Flandre orientale. Et Cockerill comptait déjà 2.500 ouvriers en Hainaut (Bologne, page 51).

Le processus de prolétarisation rapide était dû à l’accroissement démographique, mais aussi à l’exode rural des paysans, notamment parce que certains étaient dépossédés par la politique menée sous le régime français et continuée par le régime de Guillaume Ier. Il s’agissait particulièrement de l’aliénation des biens communaux : des territoires qui étaient propriété collective, communales, qui ont été privatisés, ce qui a forcé de nombreux paysans à devoir commencer à vendre leur force de travail.

La situation pour les masses était misérable. La concurrence avec les produits principalement britanniques exerçait une pression sur les conditions de travail, impliquant de longues journées de travail. Les patrons pouvaient compter sur une énorme réserve de travailleurs vu que de nombreux paysans étaient poussés vers les villes par les famines et les bas prix des produits agricoles. Cette concurrence entre travailleurs impliquait des rémunérations salariales très faibles, bien en dessous du minimum vital. Le travail des enfants était loin d’être rare, car les familles avaient besoin que chacun de leurs membres vendent leur force de travail pour être capables de vivre.

Pour faire face à la concurrence, les industries introduisent sans cesse de nouvelles machines et de nouvelles méthodes de production, ce qui a mis beaucoup d’ouvriers au chômage. Ceci explique pourquoi le processus révolutionnaire verra de nombreuses destructions de machines de la part d’ouvriers en colère.

Un crise économique grave s’est développée en 1817. Et la maladie de la pomme de terre est apparue et s’est répandue ; étant l’aliment principal, elle a causé une très grande famine. La crise a provoqué la fermeture de nombreuses manufactures, entrainant un chômage de masse. A Liège, par exemple, 17.000 personnes étaient obligées de vivre de mendicité ou de brigandage. Au début des années 1820, quelques émeutes éclateront à cause du mécontentement. On pouvait sentir les prémices d’une situation révolutionnaire.

La situation s’aggravera encore avec de nouveaux impôts levés sur la mouture et sur l’abattage, qui augmentaient le prix du pain et de la viande. Ils rapportaient 5 millions de florins à l’État, mais rendait encore plus difficile la vie des masses. Ces impôts seront finalement abolis en 1829 mais évidemment trop tard : le mal était déjà trop profondément ancré.

La période qui précède les évènements révolutionnaires de 1830 est donc marquée par une bourgeoisie qui accumule des richesses, sous le régime d’Orange-Nassau qui favorise le protectionnisme, l’exploitation ouvrière et de l’exploitation des colonies, même si elle attendait davantage de la politique de Guillaume Ier ; et des masses prolétaires et paysannes qui accumulent la misère, les pertes d’emplois et l’écrasement sous les impôts et taxes.

L’INSURRECTION DE 1830

C’est cette situation qui va engendrer la volonté d’action. L’étincelle qui mettra le feu aux poudres sera le déclenchement de la révolution en France le 27 juillet 1830 ; la révolution de Juillet, connue sous le nom des « Trois Glorieuses ». Les ouvriers imprimeurs étaient déjà en grève depuis quelques jours ; le peuple de Paris se révolte à leur suite et les insurgés occupent toute la ville, utilisant largement journaux et tracts pour relayer la lutte.

Cet évènement aura une grande influence sur le prolétariat et les masses un peu partout en Europe, particulièrement dans les provinces du Sud des Pays-Bas, mais aussi dans plusieurs régions de la péninsule italienne, de la Confédération germanique et jusqu’en Pologne : l’Insurrection de Novembre, contre l’empereur de Russie Alexandre Ier.

Dans la future Belgique, la situation commence à y bouger au début du mois d’août. Dans les principaux centres industriels éclatent des premières explosions de colère spontanées et des affrontements avec les forces de l’ordre. On pouvait y entendre des chants révolutionnaires français comme la Marseillaise et la Parisienne chantés par les ouvriers, pour faire écho aux évènements en France, et des drapeaux français commencent à s’afficher. Certains meneurs de Paris viendront même aider l’insurrection dans le sud des Pays-Bas.

Durant le mois d’août, le gouvernement va précipiter les choses, avec notamment l’augmentation du prix du pain et l’organisation de grosses et coûteuses festivités à Bruxelles pour le 59e anniversaire de Guillaume Ier. A partir du 22 août, on peut lire sur des affiches placardées : « Révolution pour le 25 août ! ».

Le 24 août, des attroupements de masse se font dans les rues ainsi que dans les estaminets et les cabarets. Comme le précise Bologne, jusqu’alors les estaminets étaient fréquentés par la bourgeoisie, mais durant le processus révolutionnaire, les masses s’en sont saisis. Dans une société connaissant de tels évènements, les masses ont besoin d’endroits de ralliements pour s’organiser.

La représentation de la Muette de Portici au Théâtre de la Monnaie

La Muette de Portici était un opéra racontant l’insurrection napolitaine contre le Roi d’Espagne en 1647. Depuis la création du royaume de Belgique, les livres d’histoire et manuels scolaires nous racontent que c’est lors d’une de ces représentations théâtrale, le 25 août 1830 à l’occasion des 59 ans du roi, que la révolution belge « contre les Pays-Bas » aurait commencé : les spectateurs présents dans la salle, prenant conscience sur base de cet opéra de leur oppression nationale, se seraient levés, certains criant « Vive la liberté ! », et seraient sortis sur la Place de la Monnaie, entrainant la foule dans une révolte contre « l’occupation hollandaise », brandissant des drapeaux portant les couleurs de la future Belgique.

Ça c’est pour « l’Histoire » officielle, qui a pu être légèrement adaptée par moment, mais qui reste sensiblement aujourd’hui le même discours. On peut ainsi par exemple lire dans La Révolution belge de 1830 racontée aux enfants… et aux grands qui l’ont oubliée (4) publié en 2004 : « Lorsque le ténor Lafeuillade, dans le rôle de Masaniello, entonne avec son compagnon Pietro, le célèbre ‘Amour sacré de la Patrie…’, il déclenche dans la salle une effervescence générale. Les bourgeois escaladent les banquettes, envahissent la scène. Les acclamations résonnent, le public reprend en chœur le couplet. (…) Des gens crient ‘Vive la liberté!’ (…) ‘À bas les oppresseurs!’… ‘À bas les tyrans’ (…) ‘Dans la rue!’… ‘Sur la place!’ » (page 21).

Ce n’était pas des gens ordinaires qui se trouvaient dans la salle ; ceux-ci ne pouvaient se payer le luxe d’assister à de telles représentations. Par ailleurs, la Place de la Monnaie était en effet noire de monde ce soir-là, comme la veille, et la police a tout de suite perdu le contrôle. Mais au contraire de ce que raconte l’histoire officielle, la foule n’a pas été entrainée dans sa révolte par les spectateurs du théâtre. Ceux-ci étaient cloîtrés à l’intérieur, par peur des masses à l’extérieur qui se révoltaient pour le changement ; la foule n’en avait pas contre les soi-disant occupant hollandais, mais contre l’élite dirigeante de l’État ; aucun drapeau noir-jaune-rouge n’était brandi, mais bien des drapeaux français, symbole révolutionnaire d’ailleurs hissé par les insurgés en haut de l’hôtel de ville de Bruxelles.

Le 27 août sera une véritable insurrection prolétarienne. Les masses prennent le contrôle des lieux publics et des groupes se saisissent d’armes et de munitions. Dans les usines, des groupes d’ouvriers se sont attelé à la destruction de machines. Celles-ci étaient largement vues comme la cause du chômage et donc de la misère. Les fabriques de machines des environs sont également prises pour cible, faisant écho à un mouvement similaire mené par des ouvriers à Manchester en 1819. La bourgeoisie se sent alors directement visée dans ses propriétés.

La création de la « garde bourgeoise » pour tenter de mater la révolution

Face à tous ces évènements, la bourgeoisie demanda au gouvernement d’envoyer davantage de troupes militaires. Mais elles sont trop peu nombreuses face à la révolte ; débordées, elles sont incapables de défendre la propriété privée.

Dès le 26 août, la bourgeoisie décidera de s’armer elle-même pour préserver ses biens, soit en suppléant l’armée du royaume des Pays-Bas, soit pour tenter de directement maintenir l’ordre. C’est ainsi que naît la « garde bourgeoise », créée par le baron Emmanuel Van der Linden d’Hooghvorst.

La bourgeoisie essaie alors de reprendre les choses en main. Sa garde sera armée par le régime. Sa première mission sera de désarmer le prolétariat et, ce, par tous les moyens, y compris contre de l’argent ou en les faisant boire. Mais elle participera aussi directement à la répression, notamment le 27 août en tirant sur les masses révolutionnaires pour protéger le Palais royal. La classe dominante de la future Belgique a contribué à la mort de centaines de manifestants qui sont tombés sous les balles de la répression durant tout le processus de cette révolution.

La création de la garde bourgeoise illustre à quel point cette classe était attachée à l’Ancien régime et voulait le préserver, même si certains de ses intérêts divergeaient du régime d’Orange-Nassau. La bourgeoisie essaiera de se servir de la révolte populaire comme levier pour appuyer des revendications, jusque-là refusées par celui-ci, auprès du roi. Mais elle n’avait aucune volonté révolutionnaire et craignait même une chute du régime, qui n’aurait pas nécessairement signifié la création d’un meilleur régime pour la défense de ses intérêts. Elle en est donc venue à la défense physique de cet Ancien régime.

Les princes d’Orange attisent les flammes de la révolution

Guillaume Ier refuse de faire des concessions en se ralliant aux propositions de la bourgeoisie et décide d’envoyer plus de troupes sur Bruxelles pour rétablir l’ordre, avec ses fils à leur tête : le prince Guillaume d’Orange, futur roi des Pays-Bas sous le nom de Guillaume II, et son frère Frédéric. Le 31 août, les princes seront accueillis à Vilvorde par la garde bourgeoise. Mais le prince Guillaume n’accepta pas le fait que le drapeau du royaume ait été remplacé par le drapeau brabançon, ce qu’il prenait pour un acte de sédition.

En effet, la garde bourgeoise avait remplacé le drapeau français hissé à l’hôtel de ville par le drapeau brabançon, similaire au drapeau du futur Royaume de Belgique : trois bandes horizontales aux couleurs rouge-jaune-noir. Pour la garde, pas question bien sûr d’accepter l’utilisation du drapeau français, symbole révolutionnaire. Pas question non plus de réinstaller le drapeau des Pays-Bas, symbole du régime ; cela aurait attisé la colère et, pour les masses, cela aurait été la preuve de la fidélité des bourgeois au gouvernement. Pour tenter de détourner la révolte, la garde bourgeoise avait donc choisit un autre drapeau, arborant les couleurs de l’étendard du Duché du Brabant et des États belgiques unis.

Elle tenta de calmer le prince en le lui expliquant, et lui proposa de reporter son arrivée à Bruxelles, car sa protection ne pouvait être assurée. Devant le refus du prince, la garde parvint à le convaincre que, pour calmer les esprits, il était préférable qu’elle l’escorte elle-même jusqu’à Bruxelles, sans ses troupes pour éviter d’envenimer les choses. Mais au milieu de la foule, le prince Guillaume prit peur et s’enfuit se réfugier dans le Palais royal, ce qui donna un sentiment de puissance aux masses et une humiliation pour le régime. C’était la démonstration du fait qu’à Bruxelles, ce n’était ni le régime de Guillaume Ier ni la bourgeoisie locale qui contrôlait réellement les évènements.

La bourgeoisie est divisée

La conduite maladroite du prince n’a fait qu’augmenter la révolte. Des bourgeois prirent peur et fuiront la ville de Bruxelles. La réponse des orangistes était de ramener davantage d’hommes entrainés pour essayer de rétablir l’ordre. Début septembre, la garde bourgeoisie créa la « Commission de sûreté publique », chargée de renforcer la défense bourgeoise et d’essayer de calmer le peuple.

C’est dans cette période-là que la bourgeoisie va davantage se diviser entre des éléments conservateurs et des éléments plus progressistes. Dans les rangs bourgeois, différents courants défendaient des voies distinctes. Un courant minoritaire était en train de se développer : face à la majorité qui restait pro-régime, une minorité défendait l’idée d’une proclamation d’indépendance vis-à-vis du royaume des Pays-Bas.

C’est Louis De Potter, l’un des dirigeants de la lutte à Paris, petit-bourgeois issu d’une famille anoblie, mais progressiste, vu comme un défenseur des opprimés et très populaire auprès du prolétariat dans les provinces du sud, qui va cristalliser cette division en envoyant une lettre critiquant les conservateurs. Face à la création de la Commission de sûreté publique, qui s’appuyait davantage sur la grande bourgeoisie, De Potter et d’autres bourgeois plus progressistes créèrent la « Réunion centrale », qui prend directement ses appuis sur la révolte populaire.

Septembre 1830 : marches sur Bruxelles, victoire insurrectionnelle et création du gouvernement provisoire

Des évènements à caractère révolutionnaire eurent lieu ailleurs qu’à Bruxelles. L’ensemble de la société était en ébullition. Mais tout comme l’a fait Maurice Bologne, cet article se concentre sur la future capitale, qui était vue comme le lieu par excellence symbolisant le pouvoir. Bologne cita tout de même une série de régions où des événements révolutionnaires importants eurent lieu : Gand, Anvers, Bruges, Huy, Liège, le Borinage, Verviers, Malines,… (Bologne, page 104)

Mais l’essentiel des évènements se déroulèrent à Bruxelles. Le début du mois de septembre a d’ailleurs vu de nombreux ouvriers et paysans d’un peu partout en Belgique se rendre dans la future capitale, en provenance surtout du Borinage, du pays de Liège, de Wavre, du Limbourg et de la Flandre occidentale et orientale. Ces sont de véritables « marches sur Bruxelles » qui portent les masses pour venir défier le pouvoir.

L’hôtel de ville sera pris d’assaut et des milliers de prolétaires commenceront à désarmer la bourgeoisie et à organiser la ville pour se préparer à la riposte des armées du régime. C’est une défaite pour la Commission, et vécu comme une victoire pour la Réunion centrale et pour la rue.

Beaucoup de bourgeois prendront la fuite, y compris des éléments progressistes, par peur de représailles en cas de victoire du régime, mais surtout par peur d’une défaite de l’armée. Le 23 septembre, ce sont des milliers de soldats qui entreront dans Bruxelles, dont une majorité issue des provinces du sud. Mais les ouvriers et paysans ont pu résister, d’autant plus que les renforts arrivaient toujours sur Bruxelles.
Un vide du pouvoir s’installe alors, et vu la tournure des évènements, des bourgeois reviennent et profitent de la désorganisation de l’insurrection. Se rendant compte que le maintien du régime sera difficile, la Commission de sûreté publique se transforme en Commission administrative, sous la direction du liégeois Charles Rogier, pour commencer à réorganiser le pouvoir. Elle nomma une série de responsables aux postes-clés et se transformera ensuite en gouvernement provisoire le 26 septembre, tandis que l’armée abandonne l’offensive à l’aube du 27 septembre.

Les insurgés sont victorieux ; Louis De Potter est acclamé à Bruxelles. La rue le voyant comme « son représentant », la bourgeoisie se rend compte qu’elle va devoir compter avec lui face à la pression des masses. Il entre donc au gouvernement, comme seul représentant des éléments plus progressistes. De Potter avait l’illusion qu’il pourrait faire passer auprès du gouvernement provisoire ses revendications plus radicales. Les bourgeois allaient évidemment profiter de la première occasion pour l’écarter ; et quel meilleur moyen que de lui faire porter toute la responsabilité des futurs actes impopulaires des autorités.

La proclamation d’indépendance

Le 4 octobre, le gouvernement provisoire proclame l’indépendance des provinces du sud. Pendant que les masses sont toujours en train de repousser les restes des troupes royales, la bourgeoisie, qui n’a aucune activité dans le processus, commence à préparer la tenue du Congrès national. Dans ce processus, De Potter sera mis en avant par la bourgeoisie, pour s’assurer du soutien des masses.

La rhétorique nationale officielle qui dira vouloir « en finir avec l’occupation hollandaise » peut commencer, même s’ils sont encore beaucoup parmi la bourgeoisie à être contre ou à ne pas être convaincus de l’attitude indépendantiste de création du nouvel État.
L’idée de déclarer l’indépendance a été essentiellement lancée face à l’incapacité du régime à reprendre le contrôle. Mais la majorité de la bourgeoisie, et notamment Charles de Brouckère et Joseph Lebeau, ne voulait pas perdre les bénéfices qu’offrait le régime des Pays-Bas, notamment pour sauvegarder l’avantage que représentent les marchés hollandais et de ses colonies, principalement indonésienne, pour l’industrie des provinces du sud. Dès le 5 octobre, le prince Guillaume d’Orange s’établit à Anvers pour plusieurs semaines. Les autorités du nouvel État mèneront avec lui des négociations en vue d’en faire le souverain, ce qui aurait permis de garder une grande partie des avantages, et notamment celui précité.

Le Congrès national balaye les intérêts des masses

A l’approche du Congrès, la bourgeoisie était encore obligée de tenir compte du mouvement de masse qui venait de repousser l’armée orangiste. Même L’Union belge, le journal officiel du gouvernement provisoire, le reconnaissait le 18 octobre, sous l’influence du prolétariat encore armé : « La mission du Congrès national, mission haute et sacrée, est de manifester par la Constitution la volonté du peuple, et surtout celle des classes inférieures. Ce sont elles, en effet, il ne faut pas hésiter à le reconnaitre, ce sont elles qui ont donné le signal de la résistance à l’ennemi ; qui, à défaut de poudre, ont trouvé les pics et les pavés ; qui, affrontant avec une héroïque ivresse les canons et la fusillade, ont rendu à tous la conscience de leurs droits et de leurs forces et la foi en l’avenir. » (Bologne, page 105). Mais la classe dominante fera tout pour écarter les intérêts des masses.

Le Congrès national se réunit finalement le 10 novembre ; il décidera du nouveau régime à mettre en place. De Potter, s’appuyant sur les revendications de la rue, avait beau avoir argumenté pour une république, ce sera une monarchie qui sera mise sur pieds ; elle sera actée le 22 novembre par 171 votes contre 13. La bourgeoisie ne voulait pas d’une république, bien trop proche du modèle prôné par les révolutionnaires français et qui pourrait fâcher ses futurs potentiels alliés : les Empires environnants, notamment les Orange-Nassau bien sûr, mais surtout l’Empire britannique et le Royaume de Prusse.

Fin octobre, l’armée orangiste bombarda la ville d’Anvers, ce qui entrainera la décision du Congrès d’exclure la maison d’Orange-Nassau du trône de Belgique. En juin 1831, Léopold de Saxe-Cobourg, d’origine germanique et résidant en Angleterre, sera nommé roi ; notamment pour contenter l’allié britannique. Il épousera par ailleurs plus tard la princesse Louise d’Orléans, pour également sceller une alliance avec la monarchie française.

L’une des revendications les plus importantes des masses était le suffrage universel. Sous pression du mouvement révolutionnaire, la bourgeoisie avait d’abord promis de l’appliquer : « Le 10 octobre, un arrêté du gouvernement provisoire faisait connaître les modalités de l’élection des députés au Congrès national dont la mission haute et sacrée était de manifester surtout la volonté des classes inférieures. Il proclame en termes ambigus que, le Congrès devant être une véritable représentation nationale, il est nécessaire d’adopter, dès à présent, un système d’élection direct et libéral, mais qu’à titre transitoire on garde les bases de l’ancien système censitaire pour éviter des lenteurs. » (Bologne, page 106). Autrement dit, une personne a le droit de vote si elle est capable de payer le cens. Ainsi, sur une population de 4 millions d’habitants, 46.000 seront électeurs… La base élective est très éloignée de la base qui a lutté pour obtenir le droit de vote.

Ce refus du suffrage universel montre la volonté d’écarter les masses de toute influence politique alors que ce sont elles qui avaient combattu. Par la suite, la pression du mouvement diminuant, ce système électoral restera bien sûr en place bien plus longtemps, jusqu’en 1893 ; et en réalité 1919 pour les hommes, et 1947 pour les femmes. Le système censitaire sera d’ailleurs inscrit dans la première constitution en 1831…

Par ailleurs, l’accession aux organes de représentation était exclusivement réservée aux classes dirigeantes, profondément conservatrices et répressives. Par exemple, pour être candidat à l’élection au Sénat, il fallait faire partie des 400 propriétaires qui payaient plus de 1.000 florins.

De Potter se rendit bien compte qu’il avait été manipulé dans le but de donner une légitimité aux dirigeants qui tentaient de dévier l’insurrection. Mis en extrême minorité sur chacune de ses propositions, il quittera tout de suite ses fonctions et le Congrès, et parti même en exil en France durant plusieurs années.

Le nouvel État face aux Pays-Bas et aux grandes puissances européennes

Pour Guillaume Ier, cette insurrection victorieuse et la proclamation d’indépendance des provinces du sud est une énorme débâcle. Pendant très longtemps, l’histoire racontée au royaume des Pays-Bas parlera de « complot français ».

Le régime d’Orange-Nassau n’abandonna d’ailleurs pas aussi vite ses provinces du sud et ses industries florissantes. En août 1831, après l’élection de Léopold de Saxe-Cobourg en tant que souverain du nouveau royaume, les Pays-Bas tenteront une invasion du pays. C’est l’épisode de la campagne des Dix-Jours, lors duquel ils seront repoussés notamment par l’armée du nouvel allié le royaume de France, avec le soutien de l’Empire britannique.

Les grandes puissances européennes acceptèrent en effet assez vite la création du nouvel État, notamment pour ramener l’ordre au plus vite dans une Bruxelles remplie de révolutionnaires venus de partout en Europe, mais aussi avec l’objectif d’en faire un nouvel État-tampon contre la France. Leurs relations avec celle-ci s’étaient certes légèrement réchauffées depuis la restauration monarchique, mais le foisonnement révolutionnaire en faisait un danger quasi permanent – ce qui sera à nouveau vérifié dès 1832, mais surtout en 1848.

Cela prendra une décennie pour que les Orange-Nassau reconnaissent le nouvel État belge. Cela prendra aussi au moins une décennie pour que l’ensemble de la bourgeoisie belge accepte la situation et particulièrement la perte du marché néerlandais et de ses colonies.

LES LEÇONS POLITIQUES DU PROCESSUS RÉVOLUTIONNAIRE

La révolution de 1830 a été le produit de l’insurrection prolétarienne mais a été récupérée totalement et immédiatement par la bourgeoisie. Maurice Bologne parlait de « Coup d’État des chefs bourgeois ».

En réalité, dans tout processus révolutionnaire, l’action des masses est centrale. Mais dans l’Histoire officielle, le rôle de celles-ci est toujours très largement diminué, car la classe dominante a tout intérêt à exagérer son propre rôle et car la compréhension de leur propre pouvoir par les masses est un risque que la classe dominante ne veut pas prendre ; des évènements révolutionnaires risqueraient alors de resurgir encore plus rapidement… L’histoire est écrite par les vainqueurs, qui falsifient le déroulement des évènements. La bourgeoisie a non seulement réussi à confisquer la victoire des masses, mais aussi à modifier la mémoire collective autour de cette révolution et de la création de l’État belge.

Comme le souligne Anja Deschoemacker dans La question nationale en Belgique (2) : « La création de l’État belge a lieu à un moment où il y a des bouleversements nationaux un peu partout. Différents mouvements nationaux conduisent à la chute des derniers empires. Ainsi, juste avant 1830, la Grèce et la Serbie ont acquis leur indépendance, dans une période de répression sanglante contre les soulèvements en Italie, en Pologne, dans le sud de l’Allemagne,… tandis que l’Irlande poursuivait sa lutte contre la domination britannique. »

Dans La Révolution belge de 1830 racontée aux enfants… (4), on peut lire : « Le peuple va rendre les Hollandais responsables de la misère, du chômage et du pain cher » (page 13). La future Belgique n’était en réalité pas sous la domination « nationale » des Pays-Bas unis, même si la religion dominante était différente et que des divergences linguistiques existaient entre la bourgeoisie et le régime hollandais car, contrairement à la majorité de la population de la future Belgique, la langue de la bourgeoisie était le français ; elle voulait développer sa langue et s’opposait ainsi au néerlandais et au bilinguisme. La bourgeoisie a su utiliser le contexte international pour servir ses intérêts : en parlant de « nation belge », elle transforme l’insurrection prolétarienne en révolte nationale, patriotique. La révolte des masses est détournée et focalisée sur un ennemi étranger – la Hollande – ce qui permet d’unifier les différentes classes des provinces du Sud.

Le mouvement révolutionnaire de 1830 dans les provinces du sud n’avait rien de « national » : il n’existait pas de but conscient de créer une patrie belge. Et la fameuse devise « L’union fait la force » n’avait rien à voir avec une unité entre différentes classes ou entre différentes communautés linguistiques, mais bien avec l’unité entre les courants catholique et libéraux de la bourgeoisie, « l’unionisme » évoqué plus avant ; un accord dont les masses sont exclues.

D’autres interprétations de la révolution de 1830 existent également. L’une met par exemple en avant le but conscient – et manqué – des révolutionnaires de rattacher les provinces du Sud à la France. Une autre raconte que la Belgique serait un État créé de toute pièce consciemment par les grandes puissances européennes, en collant l’un à l’autre deux peuples qui n’ont rien à voir ensemble. C’est l’interprétation « fédéraliste » que défend de nombreux nationalistes flamand et wallons, qui nie complètement le processus révolutionnaire ayant mené à la formation de l’État.

Mais ce sont les masses qui se dressaient contre la misère, l’augmentation des prix et le chômage grandissant. Dans leur révolte, ils se confrontaient aux intérêts tant du gouvernement des Pays-Bas unis qu’à ceux de la bourgeoisie des provinces du sud.

Redonnons une dernière fois la parole à La Révolution belge de 1830 racontée aux enfants… et aux grands qui l’ont oubliée (4) : « (…) ce n’est pas une révolution ouvrière avec la volonté du peuple de changer sa condition. D’ailleurs, lorsque la Révolution aura triomphé, personne ne réclamera du côté du peuple, ou de ceux qui auraient pu être son porte-parole. Le peuple s’était battu pour chasser les Hollandais, il avait réussi, il n’avait pas d’autre objectif. » (page 14). Au contraire, on peut très probablement avancer le fait que si les travailleurs et paysans ne s’étaient pas révoltés pour tenter de changer leur condition de vie, la Belgique indépendante n’aurait pas vu le jour.

La classe bourgeoise et ses appareils politiques et militaires ont confisqué la victoire que les masses ont remporté contre le régime d’Orange-Nassau. En détournant la victoire vers une indépendance politique, la future bourgeoisie belge y a perdu, du moins les premières années, puisqu’elle a dû laisser tomber un marché plus grand, et que les politiques menées allaient globalement dans son sens, même avec les quelques freins qui existaient.

Par ailleurs, la bourgeoisie anticléricale s’est longtemps opposée à la création de la Belgique parce qu’elle savait que ça allait renforcer le poids de l’Église catholique dans la vie publique, le catholicisme devenant de loin la religion principale dans le nouvel État. Elle fera tout de même une alliance avec l’Église, lui permettant d’organiser un puissant réseau catholique scolaire, social, culturel, etc.

Le risque d’une révolution dont la bourgeoisie ne pouvait contrôler le processus était trop grand, et elle risquait d’y faire face si elle ne se positionnait pas contre le régime de Guillaume Ier. Elle a donc finalement réussi à sauvegarder ses intérêts, et a dû affronter les faiblesses liées à ce nouvel État sur un territoire et une population beaucoup plus restreints, mais qu’elle allait pouvoir « façonner » dans les années à venir pour assurer au mieux ses intérêts de classe.

Symboliquement, la question du drapeau brabançon évoquée plus avant résume assez bien l’attitude de la bourgeoisie durant tout ce processus révolutionnaire : tenter de dévier la colère des masses pour sauvegarder ses intérêts de classe, c’est son fil conducteur. Il n’y a ici aucun « élan national » contre le soi-disant « occupant hollandais ».

La bourgeoisie belge n’a pas joué son rôle historiquement nécessaire lors de la révolution bourgeoise

Reprenons les mots d’Anja Deschoemacker dans La question nationale en Belgique (2) : « Du point de vue économique, l’indépendance belge a été un fiasco. La Belgique avait déjà été coupée de son marché français avec le Traité de Vienne en 1815, mais la politique d’industrialisation de Guillaume et l’augmentation de la production par l’introduction des machines avaient en grande partie résolu ces problèmes. De fait, la bourgeoisie avait trouvé au sein de la Hollande un cadre favorable à son épanouissement économique qui l’a rendu aussi orangiste sous Guillaume d’Orange que napoléonienne sous Napoléon. Cependant, il en allait différemment pour la population ouvrière qui souffrait énormément des impôts, des conséquences de la concurrence avec la Grande-Bretagne et de la famine. »

« Economiquement, la bourgeoisie industrielle n’avait aucun intérêt à réclamer une indépendance qui a surtout eu pour signification que la Belgique allait être coupée de son marché principal pour la deuxième fois en 15 ans. En conséquence, ce n’est qu’à partir de 1839 que la grande bourgeoisie a réellement commencé à soutenir l’État belge. Jusqu’à ce moment, date du traité de paix entre la Belgique et les Pays-Bas, elle refusait d’octroyer des fonds et des emprunts tandis que les Pays-Bas bloquaient les produits belges. De plus, l’industrie belge avait perdu son statut privilégié pour l’exportation en direction des colonies hollandaises et de nouveaux marchés étaient difficiles à trouver. Le commerce de transit belge avait lui aussi reçu de rudes coups à cause de la fermeture des eaux intérieures hollandaises. Plusieurs entreprises (reprises par la Société Générale) ont ainsi connu la faillite et la population l’appauvrissement. (…) »

« La bourgeoisie belge n’a donc pas joué son rôle historiquement nécessaire lors de la révolution bourgeoise. Elle s’est en fait basée sur les résultats obtenus par la révolution française qui ont été exportés en 1792-95 par Napoléon (…). Dans sa lutte contre les travailleurs et les paysans, la bourgeoisie industrielle s’est même unie avec la classe qu’elle aurait logiquement dû renverser : l’aristocratie féodale, accompagnée par l’église. »

Privé d’expérience et d’instruments de lutte, le prolétariat n’a pas pu défendre ses intérêts

Lors du processus révolutionnaire de 1830, on a pu voir des embryons de traditions de luttes qui seront saisies et développées dans l’histoire de la future Belgique. C’est notamment le cas de la « Marche sur Bruxelles », une idée que l’on retrouvera à d’autres moments-clés de l’histoire de la lutte des classes. Ce sera par exemple le cas en 1950, durant « la question royale », lorsque la menace d’une Marche sur Bruxelles fera abdiquer Léopold III ; ou encore lors de la Grève du siècle à l’hiver 1960-1961, durant laquelle l’idée très populaire d’une Marche sur Bruxelles sera refusée par la bureaucratie syndicale autour d’André Renard, qui tentera de dévier la lutte vers des revendications nationalistes d’autonomie pour la région wallonne (5). À nouveau, l’aspiration révolutionnaire des masses sera détournée vers le nationalisme.

Mais à l’époque, le prolétariat était jeune, dépourvu d’expérience collective en tant que classe et inorganisé. Il n’a pas pu compter sur un outil politique pour défendre ses propres intérêts. Ce sera quelques années plus tard qu’apparaitront les embryons d’organisations de la classe des travailleurs, notamment en 1836 avec la Ligue des Justes de Karl Marx et Friedrich Engels, qui deviendra la Ligue des communistes en 1847 et qui publiera le « Manifeste du parti communiste ». Lors de la période révolutionnaire de 1848 en Europe, des organisations verront le jour, notamment des clubs socialistes dans la France de la Deuxième République. L’Association internationale des travailleurs, « la Première Internationale », sera créée en 1864.

Au milieu du 19e siècle, comme l’explique Anja Deschoemacker dans La question nationale en Belgique (2) : « (…) Les seules formes d’organisation ouvrière étaient les mutuelles et, un peu plus tard, les coopératives, qui n’ont toutefois pas subsisté longtemps. Les premières véritables organisations de résistance de la classe ouvrière se sont développées en Flandre, notamment dans la ville industrielle de Gand, sous la pression d’une crise survenue dans le secteur du textile. »

« C’est cette crise qui a mené à ce que cela soit justement à Gand – une des villes industrielles belges de premier plan malgré qu’elle ait été enfermée dans la Flandre rurale – que ces premiers organisations ont vu le jour. L’économie en Wallonie était à ce moment en pleine période de croissance, la lutte ouvrière n’y a en fait sérieusement commencé qu’une dizaine d’années plus tard dans les années 1860. De plus, le mouvement ouvrier wallon était sous l’influence encore forte des idées de Proudhon, qui s’était notamment opposé aux grèves dans la Première Internationale. Ces opinions dévastatrices ont été plus vite rejetées à Gand sur base des expériences tirées de la lutte. »

« Gand s’est développée au cours du 19e siècle en « Cotton City », le Manchester du continent. En 1857, les premiers syndicats y ont fait leur apparition sous la forme de la Société Fraternelle des Tisseurs de Gand et de la Société des Frères en Misère (les fileurs), dirigée par les travailleurs J. De Ridder et Cies Bilen. C’étaient là de véritables syndicats dans le sens qu’ils ne réunissaient en leur sein que des travailleurs dans le but de lutter contre les patrons, un type d’organisation tout à fait autre que les organisations de compagnons héritées du féodalisme. Avec le jeune E. Moyson et Dufranne, ces organisations ont organisé la résistance ouvrière qui éclata entre 1857 et 1861 en réaction à la crise dans le secteur du textile consécutive à la très dure concurrence anglaise. »

« Il est devenu rapidement clair qu’il s’agissait effectivement d’un nouveau type d’organisation lors de la grève de 1857 qui exigeait des augmentations de salaires contre les diminutions imposées à cause de la crise ainsi que l’abolition du nettoyage de l’usine le dimanche et des réparations des machines sur le dos des travailleurs. Cette grève a été organisée d’une façon jamais vue auparavant: des mots d’ordres clairs, une exécution immédiate, des liens de solidarité avec Roubaix, d’où arrivait le financement de soutien. Les patrons ont accusé les travailleurs de coalition – ce qui était alors interdit par la loi – et la magistrature a mis la main sur les caisses de résistance. Pas moins de 25 travailleurs ont été condamnés à des peines de prison. »

« En 1859, sous l’impulsion de E. Moyson, s’effectua la fusion des deux syndicats cités ci-dessus et des Travailleurs du Métal de Gand au sein de la Ligue des Travailleurs (composée de 1600 tisseurs, 800 fileurs et 600 métallos). La même année, le patronat avait organisé un lock-out face à une grève de 800 fileurs et tisseurs qui réclamaient une augmentation de salaire. Le syndicat avait survécu aux peines de prisons et aux tentatives de la justice de mettre la main sur la caisse de résistance, mais la défaite de la grève d’avril 1861 et ses suites juridiques lui donna le coup de grâce. Cette ligue est tombée en pièces en 1862, les reins brisés par l’interdiction de coalition. L’abolition de cette loi devint dès lors une des revendications de base des syndicats créés par la suite et, en 1866, une première concession a été accordée sous la forme du ‘droit de coalition pacifique’. La Ligue des Travailleurs décomposée est très vite allée rejoindre la Première Internationale dès le moment où celle-ci a commencé à s’établir dans nos régions. »

C’est sur la base de ces premières expériences d’organisation syndicale et de coopératives, de mutuelles et de groupes socialistes récemment formés comme le Vlaamsche Socialistische Arbeiderspartij en 1877 et le Parti Socialiste Brabançon en 1878, que sera fondé le Parti ouvrier belge (POB) en 1885. (6)

En 1830, la jeune classe ouvrière était encore loin d’être organisée en tant que classe. Le prolétariat industriel est encore insuffisamment développé. Les destructions de machines vues durant le processus révolutionnaire est typiquement le signe d’un prolétariat très jeune, inorganisé, inexpérimenté dans la lutte et aux traditions politiques très faibles. De manière générale, les idées socialistes mettront encore du temps à mûrir, de même que les instruments de lutte pour le mouvement ouvrier. Dans ces conditions, une révolution socialiste victorieuse eut été difficile à concevoir : difficile pour les masses d’arriver à un objectif collectif ; et plus facile pour la bourgeoisie d’arriver à dévier le mouvement révolutionnaire.

Lorsque le prolétariat aura engrangé de l’expérience et construit des organisations de lutte, il utilisera ses propres méthodes pour lutter contre la classe dominante et tenter de défendre les intérêts de l’immense majorité de la population. Cela se produira entre autres lors des mouvements de grèves de 1886 (après une commémoration, 15 ans après, de la Commune de Paris), pour le suffrage universel en 1902 et 1913, ou lors des mouvements de grèves révolutionnaires de 1932 (7) et 1936.

Le POB, ancêtre du Parti Socialiste (PS) en Belgique francophone et du SP.a/Vooruit côté néerlandophone, était un parti ouvrier mais avec une direction bourgeoise. Malgré celle-ci, les luttes massives de la classe ouvrière, au niveau belge et international, ont pu imposer des avancées sociales pour la majorité. Ces luttes mettaient une pression sur le POB que sa direction ne pouvait écarter sous peine de perdre sa place parlementaire.

Du fait de sa double nature – ouvrier par sa base, bourgeois par sa direction – le POB ne pouvait être le véhicule pour imposer un véritable changement. Les travailleurs doivent s’organiser, se doter d’outils y compris politique, indépendants de la bourgeoisie, qui leur permettent de défendre leurs intérêts : une organisation politique de masse réunissant les différentes couches de travailleurs et d’opprimés dans la société, ainsi que les différentes tendances et sensibilités existant dans le mouvement ouvrier.

« Conjointement à la création d’un tel instrument, pour mener un processus révolutionnaire vers la victoire, la présence d’un parti socialiste révolutionnaire est nécessaire ; un parti qui concentre les leçons et les expériences des luttes de l’histoire et trace des perspectives pour mettre à bas le système capitaliste et construire une société socialiste démocratique. Sans cet outil, la classe dominante parviendra toujours à dévier l’objectif collectif d’un processus. Un tel instrument est nécessaire pour orienter l’ardeur révolutionnaire des masses vers une victoire. C’est le combat que livre le Parti Socialiste de Lutte / Linkse Socialistische Partij (PSL/LSP) en Belgique et Alternative Socialiste Internationale (ASI/ISA) à travers le monde.

Notes et liste de lectures :

(1) BOLOGNE Maurice, L’Insurrection prolétarienne de 1830 en Belgique, éditions Aden, 2005 – 160 pages [Première édition : L’Églantine, 1929 – 72 pages].
(2) DESCHOEMACKER Anja, La question nationale en Belgique – Une réponse des travailleurs est nécessaire, éditions Marxisme.be, Avril 2016 – 298 pages. [En ligne : https://fr.marxisme.be/2007/01/03/la-question-nationale-en-belgique-une-reponse-des-travailleurs-est-necessaire/]
(3) REYNEBEAU Marc, Een geschiedenis van België, Lannoo, 2009 (édition révisée) – 336 pages.
(4) La Révolution belge de 1830 racontée aux enfants… et aux grands qui l’ont oubliée, Jourdan le Clercq Editions, Décembre 2004 – 160 pages.
(5) Pour en savoir davantage, lire : DACHE Gustave, La grève générale insurrectionnelle et révolutionnaire de l’hiver 1960/61, éditions Marxisme.be, Novembre 2010 – 354 pages.
(6) Pour en savoir davantage, lire : DESCHOEMACKER Anja, « La lutte pour les droits politiques : la création du POB et la lutte pour le suffrage universel », dans Extraits rebelles de l’histoire du mouvement ouvrier en Belgique, éditions Marxisme.be, Mai 2020 – 60 pages.
(7) Pour en savoir davantage sur la grève de 1932, lire : DRIESEN Frans, « 1932. La révolte des travailleurs des mines », éditions Marxisme.be, publication fin 2020.

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